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J 15 – AMIENS

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(Photos Guillaume De Crop)

Discours de Jean-Paul HENRY

Vous voir si nombreux aujourd’hui, cela fait vraiment chaud au cœur. Merci de votre présence. Merci pour toutes celles et ceux qui nous ont soutenus, accueillis et contribué à la réussite de la caravane.
Une pensée particulière pour Rémy, jeune de 21 ans mort ce week-end au Testet où nous somme passé il y a quelques jours…

Nous sommes 5 grévistes de la faim contre l’exclusion des petits paysans victimes des nouvelles dispositions franco-françaises de la PAC décidées par M. Le Foll et contre l’industrialisation de l’Agriculture.
• Michel, éleveur confédéré de l’Aude,
• Christian, éleveur confédéré Alsacien,
• Lucien, paysan-arboriculteur Breton qui toute sa vie à pratiqué l’Agroécologie,
• William, secrétaire National des Amis de la Confédération Paysanne,
• et moi, paysan dans le Haut-Doubs, en production de lait à Comté.

Nous avons été accompagnés par :
• Marie, la consom’actrice, soucieuse de l’avenir des paysans et de ses petits enfants.
• Christian Roqueirol, paysans du Larzac, membre du Comité national et de Via Campesina,
• Guy, délégué général du réseau Semences Paysannes,
• Michel, co-fondateur de la coopérative Andines dans une démarche d’économie équitable et solidaire.

Enfin, les « petites mains », invisibles, mais si importantes pour l’arrivée de notre caravane à bon port : Yome, le faucheur Volontaire (grand reporter de tout ce périple ndlr) et Jean-Pierre, militant multicartes, tous 2 à temps plein.
Nous sommes partis le 15 octobre de Narbonne et après 3000 km,  nous sommes à  Amiens. Et depuis, nous n’avons pas mangé !!!

Bien sûr nous avons laissé quelques Kilos en route. Mais la solidarité du groupe a été forte et nous a aidés à tenir. Les petites frustrations ne sont rien par rapport aux souffrances et à la précarisation des petits paysans français qui vont se retrouver au RSA, voir à la rue et sans-terre, comme les ouvriers et d’autres secteurs de l’économie.

Tout au long de ce périple, les rencontres ont été multiples : des militants, des citoyens sur les marchés ou ailleurs, des présidents et directeurs de chambres d’Agriculture, des responsables de la Direction Départementale du Territoire et de la Mer, des préfectures. Beaucoup ont été sensibles à nos arguments. Nous avons même eu des rendez-vous avec des responsables socialistes gênés aux entournures. Ils nous ont assurés de faire remonter notre message au ministère.
Quels messages ?!?!
Les exclus des nouvelles applications françaises de la PAC : Par exemple, à moins de 10 vaches, vous n’êtes plus considéré comme paysans et n’auraient plus de soutien financier. Nous avons rencontré un paysan-boulanger proche du Pilat. Avec 2 hectares de céréales, quelques hectares de pâtures pour ses 3 vaches-allaitantes et ses 10 moutons : Exclu ! Un autre, Jean-Louis de l’Aude, et ses 8 vaches. Également exclu ! Sans parler des éleveurs/éleveuses de chèvres, moutons, porcs, volailles, apiculteurs, maraichers, arboriculteurs, viticulteurs, les petites fermes en polyculture-élevage privé d’accès aux aides. Dans la seule filière bovine, 23000 fermes sont impactées.
Dès le départ de cette caravane de grévistes de la Faim, nous avons lancé une pétition qui, à ce jour, à recueilli plus de 10 000 signatures !!! accompagnées de nombreux messages de soutient venant du monde entier, au point d’interpeller le Ministre Le Foll.
Il a répondu, je cite : « Afin de limiter les coûts administratifs, j’ai fait le choix de relever les planchers d’attribution des aides. »  C’est vrai qu’il est tellement plus simple de faire un chèque de 300 000€ à un seul agri-manager plutôt que d’en faire 300 de 1000€ pour de petits paysans. Même si ils en crèvent ! Monsieur Le Foll, où est la justice ?
Monsieur Le Foll, dans votre réponse, vous nous dite également que vous etes soucieux des petites fermes, et que pour cela vous leur conseillez de se regrouper en GAEC, en GIEE, afin qu’ensemble, elles dépassent les seuils d’éviction. Mais Monsieur Le Foll, les petits paysans ne veulent pas se regrouper uniquement en fonction des primes. Et de nombreux petits troupeaux sont souvent très éloignés les uns des autres, particulièrement en zone de montagne. Et elles œuvrent déjà souvent au sein de structures collectives : ateliers de transformation, boutiques paysannes, coopératives biologiques, Amap, Cuma, …

La FAO, organisation internationale de l’Agriculture et de l’Alimentation, vient de publier que 70% de la nourriture mondiale étaient fourni par de petits producteurs qui ont souvent moins d’un hectare. Monsieur le Foll, ce sont elles qui pratiquent l’agroécologie qui vous est si chère, qui s’inscrivent dans une souveraineté alimentaire au service de la population mondiale. Ce sont elles qui participent à l’entretien du paysage. Ce sont elles qui jouent un rôle majeur dans la vitalité des campagnes. Ce sont donc elles qui méritent d’être soutenues, si vous voulez que la France devienne la championne du monde de l’agroécologie !

Et pendant ce temps, en France, 80% des primes sont distribuées à 20% des plus gros agriculteurs. Les exploitations industrielles sont subventionnées à cout de milliards pour leur permettre d’être plus compétitives, plus productives afin de favoriser les exportations à bas prix. Monsieur le Foll, nous vous rappellons qu’elles ne fournissent que 30% de l’alimentation mondiale. !
Monsieur Le Foll, vous n’êtes pas obligé d’écouter la FNSEA qui vous a poussé à relever ces planchers. Si on les appliquait à l’ensemble des paysans européens, 80% seraient impactées.

Cerise pesticidée sur le gâteau agro-industriel : la « loi d’avenir » a confié la gestion du registre aux chambres d’agriculture, elles mêmes largement tenues  par le syndicat dominant, plutôt qu’à la MSA à la mission plus sociale. Les gros vont décider de qui va être professionnel ou pas. Juge et partie !!! Quelle démocratie !!!!!

Alors aujourd’hui, nous sommes avec vous à Amiens.
Amiens et l’usine des 1000 vaches, cette usine à lait concentré !!!!
Et Il est LA notre second message ! Étroitement lié au premier.
Amiens, où la justice se trompe de procès.
Ce devrait être celui des incendiaires de MSA et d’hôtel des impôts à Morlaix, et non celui des 9 camarades jugés pour avoir démonté des pièces de la salle de traite des 1000 vaches. Pièces remises le jour même, au ministre de l’agriculture, M. Le Foll, afin de dénoncer ce modèle agricole.
Ce procès sera avant tout celui de l’industrialisation de l’agriculture !!! Celle-là même qui fait AUSSI crever la petite paysannerie et empoisonne tout sur son passage à grands coups de fongicides, herbicides, insecticides ! Un véritable Biocide !
Si nous laissons installer ces fermes-usines, c’est à terme, la disparition de plus de 90% des producteurs laitier du territoire.
Oui ! « 3 petites fermes valent mieux qu’une grande ! »

Pour conclure :
Cette lutte ne fait que commencer.
Jamais nous ne laisserons passer l’injustice !
Notre syndicat se bat et s’est toujours battu pour la suppression totale des planchers, et pour que TOUS les agriculteurs puissent simplement vivre au pays en bénéficiant légitimement de prix justes et rémunérateurs !
ET ce partout dans le monde. Via-campesina en est la preuve vivante !
Tous ensemble, soyons le changement que nous souhaitons pour le monde, et le monde changera !

Merci à vous !